Loi anti-fast fashion, Shein, greenwashing đ : dĂ©cryptage avec Marie Nguyen @WeDressFair
Est-ce que la fast fashion peut s'effondrer ?
Chercheuse en cancĂ©rologie de formation, Marie Nguyen est arrivĂ©e dans le monde du textile par lâengagement associatif. En fabriquant des sous-vĂȘtements Ă partir de t-shirts rĂ©cupĂ©rĂ©s pour des femmes sans-abri, elle dĂ©couvre lâenvers dâun systĂšme textile absurde. Quelques annĂ©es plus tard, elle cofonde WeDressFair, une plateforme qui ne vend que des marques de mode Ă©thique â et qui assume un positionnement radical dans un secteur dominĂ© par lâultra fast fashion.
Lâinstallation dâun corner Shein au BHV Marais en 2025 a choquĂ©. Ce nâest pas seulement lâarrivĂ©e dâune marque aux pratiques opaques dans un lieu emblĂ©matique du commerce parisien â câest la banalisation dâun modĂšle toxique. Pour Marie Nguyen, cet Ă©vĂ©nement a Ă©tĂ© un rĂ©vĂ©lateur de lâhypocrisie du marchĂ© : "on dĂ©roule le tapis rouge Ă ceux qui font le plus de dĂ©gĂąts, pendant que les marques engagĂ©es luttent juste pour exister."
Face Ă ces dĂ©rives, la mobilisation a portĂ© ses fruits. Aux cĂŽtĂ©s dâautres marques responsables rĂ©unies dans le collectif En Mode Climat, Marie a contribuĂ© Ă faire passer une loi anti-ultra fast fashion. VotĂ©e Ă lâunanimitĂ© Ă lâAssemblĂ©e nationale, puis adoptĂ©e au SĂ©nat, la loi prĂ©voit :
Pour Marie, câest une avancĂ©e concrĂšte vers une rĂ©duction des "primes au vice" : ces mĂ©canismes qui rendent les mauvais comportements plus rentables que les bons.
Mais une loi ne suffit pas. WeDressFair sâest donnĂ© pour mission de faire le tri pour les consommateurs. Chaque marque est sĂ©lectionnĂ©e selon une charte stricte, qui analyse les matiĂšres, les conditions de production, la traçabilitĂ©, et depuis peu⊠la gouvernance.
Cette Ă©volution a Ă©tĂ© dĂ©clenchĂ©e par un cas concret : la rupture du partenariat avec Organic Basics, aprĂšs son rachat par un groupe listĂ© par lâONU pour ses activitĂ©s dans les territoires palestiniens occupĂ©s. Une dĂ©cision difficile, mais assumĂ©e, qui tĂ©moigne dâune exigence rare de cohĂ©rence.
CrĂ©er une entreprise Ă impact, câest aussi une question dâargent. WeDressFair a choisi de se financer avec La Nef, coopĂ©rative financiĂšre Ă©thique.
"Comme nos clients nous délÚguent la charge mentale du choix éthique, nous on délÚgue celle du financement à une banque cohérente", explique Marie.
Au-delĂ du financement, La Nef joue un rĂŽle dâaccĂ©lĂ©rateur de visibilitĂ©, de soutien et de rĂ©seau. Une logique dâĂ©cosystĂšme oĂč lâargent nâest pas neutre, mais aligne lâimpact avec les moyens.
WeDressFair a franchi un cap. Avec plus de 4 millions dâeuros de chiffre dâaffaires en 2024, la marque est encore loin des gĂ©ants du secteur, mais elle fait partie dâun Ă©cosystĂšme en Ă©mergence, entre rĂ©paration, seconde main, sobriĂ©tĂ© et relocalisation.
La suite ? Porter le combat au niveau europĂ©en. Car si la France avance, le textile est un marchĂ© global. Marie et le collectif "En Mode Climat" travaillent dĂ©jĂ Ă crĂ©er une coalition paneuropĂ©enne pour que la rĂ©gulation ne sâarrĂȘte pas aux frontiĂšres.
.png)
Je cherche à comprendre les grands enjeux de la transition écologique, ce qui la freine, et ce qui pourrait l'accélérer, en passant par tous les grands silos de notre société : économie, agriculture, mobilité, culture, logement, énergie, politique, et bien d'autres sujets !